Expérimentation L’intérêt du maïs épi est à nuancer
Des essais réalisés à la ferme expérimentale de Trévarez, dans le Finistère, montrent que le remplacement de l’ensilage de maïs plante entière par de l’ensilage de maïs épi n’est pas toujours rentable.
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L’ensilage de maïs épi séduit certains éleveurs laitiers soucieux de récolter un fourrage très riche en énergie et d’améliorer leur autonomie alimentaire. En effet, ceux qui souhaitent augmenter la part d’ensilage d’herbe dans les rations hivernales, et ainsi réduire les besoins en correcteur azoté, trouvent dans l’ensilage de maïs épi une source d’énergie intéressante.
Mais qu’en est-il de sa valorisation réelle à l’auge ? Pour le savoir, les équipes de la chambre d’agriculture de Bretagne et de l’Idele ont mené des essais à la ferme expérimentale de Trévarez (29), dont les résultats ont été présentés en décembre, lors de la journée régionale laitière. Les deux troupeaux, bio et conventionnel, ont été impliqués dans cette expérimentation durant les hivers 2022 et 2023.
En pratique, les vaches croisées conduites en bio ont été réparties en deux lots qui ont reçu de l’ensilage d’herbe précoce à volonté, 2,7 kg de céréales au robot de traite et soit 5 kg de MS d’ensilage de maïs, soit 5 kg de MS d’ensilage de maïs épi.
Dans ce deuxième lot, l’ingestion a été plus élevée de 1,3 kg de MS/vache/jour et la production laitière a gagné 1 kg/vache/jour.
En bio, les vaches répondent bien
Dans ce cas, l’introduction du maïs épi améliore nettement la ration, d’où la réponse élevée des vaches en ingestion et en production. Rappelons que ces résultats ont été obtenus avec un ensilage d’herbe de très bonne qualité.
Par ailleurs, les taux sont restés stables en moyenne, même si le TB a augmenté de manière significative le premier hiver (+ 1,5). Aucune différence n’a été observée sur le TP, l’état d’engraissement ou la santé. Primipares et multipares ont répondu de la même manière.
Une ingestion pénalisée en conventionnel
En conventionnel, le lot témoin a reçu de l’ensilage de maïs à volonté, 4 kg de MS d’ensilage d’herbe et du tourteau de colza à raison de 260 g/kg de maïs. Pour le deuxième lot, l’ensilage de maïs a été supprimé et remplacé par 5 kg de MS de maïs épi. L’ensilage d’herbe était disponible à volonté et le colza a été réduit à 1 kg.
Ce changement de ration a provoqué une baisse d’ingestion importante, de 3,6 à 5 kg de MS par vache en moins. La production a suivi, reculant de 6,5 kg/vache/jour. Le TP a également baissé (- 1,45) et la reprise de poids a été pénalisée.
Cette différence d’impact sur l’ingestion entre le bio et le conventionnel vient de la ration initiale à laquelle on compare l’ensilage de maïs épi. Contrairement à ce qui a été observé en bio, la ration initiale était de très bonne qualité en conventionnel. L’augmentation de la part d’ensilage d’herbe l’a dégradée.
Un besoin accru en surface
En matière de coût alimentaire, on constate une hausse en bio, liée à un rendement inférieur pour le maïs épi, entre 55 et 60 % de celui obtenu en ensilage de la plante entière. Le coût de production de l’ensilage de maïs épi monte à 160 €/t de MS. En outre, pour effectuer une substitution totale, il faudrait implanter davantage de surfaces en maïs.
À l’inverse, la ration incorporant du maïs épi en conventionnel coûte moins cher que la ration initiale. Mais cette baisse du coût alimentaire ne compense pas celle de la production. La marge sur coût alimentaire perd 12 000 € sur trois mois pour 75 vaches. Et, comme en bio, cette ration demande plus de surface fourragère du fait du rendement moindre de l’ensilage de maïs épi. C’est encore plus vrai si l’on décide d’augmenter l’effectif de vaches pour compenser la perte de production. Par ailleurs, si la baisse de l’ingestion permet une réduction de l’empreinte carbone par animal, ce n’est pas le cas quand on la calcule par litre de lait.
Au final, le revenu en conventionnel est pénalisé dans le cadre de cet essai, malgré l’augmentation de l’autonomie alimentaire. Ces résultats ne remettent pas en cause l’intérêt du maïs épi dans certaines situations. «En bio, mais aussi pour les élevages soumis à des cahiers des charges limitant ou proscrivant l’ensilage, le maïs épi garde tout son intérêt », précise Valérie Brocard, ingénieure à l’Idele.
En revanche, les éleveurs de plaine en système conventionnel qui disposent d’un bon potentiel en ensilage de maïs ne sont pas forcément gagnants en passant au maïs épi. Un webinaire organisé par l’Idele fera le point sur ces situations le 6 février.
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